La bataille de Midway au cinéma (1942 – 2019)

Ce billet reprend et développe une communication présentée au congrès de l’Association pour les Études sur la Guerre et la Stratégie (AEGES) en juin 2023 à Bordeaux, prononcée dans le cadre d’un panel sur le thème “Guerre(s) et Cinéma(s)”.

Le 4 juin 1942, la guerre du Pacifique connaît un tournant majeur. En l’espace de quelques minutes, l’avantage stratégique sur ce théâtre d’opération passe des Japonais aux Américains lorsque les seconds attaquent, détruisent et coulent trois des quatre porte-avions de la flotte des premiers engagés dans la bataille. Le quatrième est également détruit dans l’après-midi du même jour. Un mois après la bataille de la Mer de Corail (mai 1942) et en parallèle de la bataille de Guadalcanal, l’avancée japonaise dans le Pacifique est ainsi définitivement stoppée

Victoire américaine décisive et engagement aéronaval majeur, la bataille de Midway, comme la guerre du Pacifique et ses principaux engagements, est bien connue des historiens, notamment grâce aux travaux de Craig L. Symonds¹, professeur émérite à l’Académie Navale d’Annapolis. Néanmoins, ses rapports avec le cinéma n’ont pas encore été étudiés en détail², en dépit des trois longs-métrages de fiction et des nombreux documentaires lui étant dédiés. Fait notable, le premier de ces films, un court documentaire de moins de vingt minutes, fut réalisé pendant l’affrontement même par John Ford, cinéaste respecté d’Hollywood. Il fut suivi d’un second documentaire, plus court, également réalisé par Ford mais focalisé cette fois-ci sur la 8^e escadrille de torpilleurs, décimée pendant l’engagement (s’en sortant avec un seul survivant sur trente aviateurs). Les trois long-métrages de fiction suivirent, tous après la guerre : l’un, japonais, en 1960³, les deux autres, américains, en 1976⁴ et en 2019⁵.

Cet article, comme le précédent, reprend une contribution à une conférence et vise ainsi à analyser les liens existants entre la bataille de Midway et le cinéma en s’intéressant aux trois films produits par le pays vainqueur, du premier documentaire de John Ford au long-métrage de Roland Emmerich, en passant par celui de Jack Smight. Il s’intéressera à l’évolution des représentations de la bataille sur grand écran chez les Américains, soulignant une évolution de 77 ans allant de prises de liberté fictionnelles vers plus de fidélité historique, du documentaire au film hollywoodien, du film de propagande au film d’hommage en passant par le film d’exaltation. Enfin, il vise à s’inscrire, à son échelle, dans le sillage de l’étude des rapports entre cinéma et histoire initiée par l’historien Marc Ferro dans les années 1970⁶.

Midway, 4 juin 1942

Contexte historique : le déroulement de la bataille

En guise de remise en contexte et avant d’aborder plus en détail le côté cinématographique, revenons sur le déroulement de la bataille de Midway.

Après l’attaque de Pearl Harbor, les États-Unis déclarent la guerre au Japon, qui pour sa part continue ses conquêtes en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique et dont le haut commandement est convaincu de l’invulnérabilité. En dépit de sa très nette infériorité stratégique, l’armée américaine organise en réaction un raid sur les îles Gilbert et sur les îles Marshall, en février 1942, qui n’inflige aux Japonais que des dégâts mineurs. Le raid de Doolittle sera pour sa part plus important. Le 18 avril 1942, seize bombardiers lancés par des porte-avions atteignent le Japon, bombardent Tokyo et plusieurs autres villes japonaises avant de se replier vers la Chine. Si là encore les résultats sont peu signifiants au sens strictement militaire, c’est la symbolique du raid qui attire l’attention. En effet, il s’agit de la toute première fois dans l’histoire du Japon qu’un ennemi vient l’attaquer sur son sol, ce qui a pour conséquence de relever le moral des Américains, mais également de faire prendre conscience aux Japonais du danger que constituent les porte-avions de l’US Navy, qui avaient par chance échappé à l’attaque sur Pearl Harbor puisqu’ils étaient alors en mer. Ceux-ci sont alors au nombre de quatre : l’USS Yorktown, l’USS Lexington, l’USS Hornet (d’où décollèrent les avions de Doolittle) et l’USS Enterprise, navire le plus décoré du conflit pouvant accueillir un équipage de près de 3000 personnes. L’amiral Halsey, qui devait commander la flotte américaine à Midway, dut y renoncer pour raisons de santé et être remplacé par l’amiral Raymond Spruance.

Plus qu’une bataille aéronavale, Midway fut également une bataille du renseignement. À Pearl Harbor, siège de la flotte du Pacifique, se trouvait une unité de cryptanalystes commandée par Joseph Rochefort et assistée par Edwin Layton, qui effectuait la liaison avec l’amiral Nimitz, commandant en chef de la flotte américaine du Pacifique.

Cette unité réussit à percer les messages japonais et à découvrir le plan japonais d’invasion de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, visant à attaquer Port Moresby par la mer, leur permettant d’envoyer un groupe de navires dont deux porte-avions. Ainsi, un mois avant Midway, la bataille de la Mer de Corail est le premier affrontement entièrement aéronaval de l’histoire, et malgré les dégâts subis par les Américains, les Japonais n’iront jamais jusqu’à Port-Moresby. L’avancée japonaise est ainsi stoppée pour la première fois.

Afin de venir à bout des porte-avions américains une bonne fois pour toutes, l’amiral Yamamoto, commandant en chef de la flotte japonaise, met sur pied un plan visant à attaquer et envahir l’atoll de Midway, à près de 2110 kilomètres au nord-ouest d’Honolulu et d’attendre la réaction des porte-avions américains qui, pensait-il, arriveraient de Pearl Harbor, afin de pouvoir les attaquer et les couler. Cependant, l’équipe de cryptanalyses de Rochefort réussit à intercepter et à décrypter un message japonais faisant état d’une attaque à venir sur un objectif dont le nom de code était désigné par les lettres « AF »⁷. Pensant qu’il s’agit de Midway mais sans certitude, une ruse fut mise au point pour s’en assurer, consistant en l’envoi d’un message par la base militaire de Midway faisant état d’une panne des machines de désalinisation d’eau, en sachant que les japonais l’intercepteraient. Peu après, les Américains interceptèrent un nouveau message des Japonais indiquant que « AF » était à court d’eau fraîche, confirmant que Midway était bien la cible du plan japonais. C’est également l’équipe de Rochefort qui parvint à découvrir ce plan en détail en continuant d’intercepter et de décrypter des messages japonais, grâce à quoi l’amiral Nimitz tendit un piège aux Japonais.

Ainsi, lorsque les Japonais attaquèrent l’atoll de Midway au matin du 4 juin 1942, les porte-avions américains n’arrivèrent pas de Pearl Harbor mais se tenaient à 520 kilomètres au nord de Midway. Lorsque la flotte japonaise fut repérée, les Américains attaquèrent. Si la vague d’avion partis de Midway fut entièrement détruite et que les deux premières vagues lancées des porte-avions américains le furent quasiment également, celles-ci firent prendre conscience aux Japonais que les dernières vagues ne pouvaient venir de Midway, jusqu’à ce qu’un avion de reconnaissance japonais ne repère la flotte américaine et ses porte-avions. Les Japonais ordonnèrent ainsi de réarmer leurs avions et de remplacer les bombes destinées à leur seconde attaque sur Midway par des torpilles, destinées à couler les navires américains. C’est en plein milieu de ce réarmement que la troisième vague d’avions américains partis de l’USS Enterprise, des bombardiers en piqué, arriva sur la flotte japonaise et parvint à couler trois des quatre porte-avions japonais en l’espace de quelques minutes. Le quatrième porte- avions fut pour sa part attaqué et coulé dans l’après-midi de cette même journée.

Un rapport immédiat au cinéma : John Ford et la Naval Field Photographic Unit

Le lien immédiat que la bataille entretient avec le cinéma, évoqué en introduction, est dû à la présence de John Ford sur l’atoll de Midway le matin du 4 juin 1942.

Cinéaste américain d’origine irlandaise, John Ford naît le 1^er février 1894 et meurt le 31 août 1973. Réalisateur à Hollywood à partir des années 1920, son influence sur le cinéma est considérable et ses films embrassent plusieurs genres, du western aux adaptations d’œuvres littéraires en passant par des films de guerre, des drames (dont Qu’elle était verte ma vallée en 1941, qui remporte 5 Oscars dont celui du meilleur film et celui du meilleur réalisateur), etc. Pendant la Seconde Guerre mondiale, John Ford, réserviste dans l’US Navy, rejoint la marine et fonde une unité, la Naval Field Photographic Unit, dont le but est de faire participer Hollywood à l’effort de guerre américain. Sa création s’inscrit notamment dans le cadre du New Deal, politique du président Roosevelt mise en place pour contrer les effets de la Grande Dépression aux États-Unis à laquelle Hollywood contribue par un « intense travail de refondation des valeurs du pays⁸ ».

Cette unité parcourt les théâtres d’opérations, à commencer par celui du Pacifique. Un documentaire sur l’attaque de Pearl Harbor le 7 décembre 1941 est notamment réalisé dans ce cadre. Ainsi, le jour de la bataille de Midway, John Ford se trouve sur l’île de Midway avec sa caméra et, réveillé par les bruits de la bataille, commence à filmer. Blessé, touché à la hanche et perdant un œil, les images qu’il enregistre donnent malgré tout lieu à un documentaire de 18 minutes, qu’il appelle sobrement La bataille de Midway⁹, dans lequel il montre des images de l’atoll de Midway avant la bataille, puis des GIs en train d’aménager la défense de l’île, puis des images de l’engagement en lui-même, sans donner de détails précis sur son déroulement, avant de s’achever sur un bilan des pertes navales japonaises.

Sorti aux États-Unis le 14 septembre 1942, le film remporte l’Oscar du meilleur film documentaire l’année suivante.

Hollywood, 18 juin 1976

Quand la fiction se mêle à l’histoire

Trois décennies après la bataille et le film de Ford, en 1976, Midway sort en salles. Réalisé par Jack Smight, le film réunit plusieurs des plus grandes stars hollywoodiennes de l’époque : Henry Fonda y interprète l’amiral Nimitz¹⁰, Hal Holbrook y interprète Joseph Rochefort, Robert Mitchum l’amiral Halsey, et l’amiral Raymond Spruance y est joué par Glenn Ford. Parmi les acteurs japonais figure Toshirō Mifune, autre grande star de l’époque, dans le rôle de l’amiral Yamamoto. Quant au scénario et au déroulement de l’intrigue, celle-ci s’ouvre sur le raid de Doolittle, et se poursuit jusqu’à la bataille.

Cependant, malgré son casting remarquable et la contribution de George Gay¹¹, vétéran de la bataille, comme conseiller historique, l’œuvre comporte de nombreux éléments fictifs ou historiquement incorrects, ou du moins incomplets. Ainsi, Edwin Layton, l’officier de renseignements de l’amiral Nimitz, n’apparaît pas dans le film, bien qu’il soit l’inspiration du rôle du capitaine Garth interprété par Charlton Heston. Autre acteur important de l’époque, James Coburn, y interprète également un officier du renseignement, mais il s’agit là aussi d’un personnage fictionnel. Par ailleurs, l’épisode sur l’identification de la cible « AF » y apparaît bien, mais John Ford est complètement absent du scénario, bien que des images de son documentaire soient directement intégrées au film. Enfin, si l’internement des nippo-américains que le long-métrage montre à de nombreuses reprises fut une réalité, la liaison entre un pilote américain et une nippo-américaine qu’il contient relève également de la fiction.

Un film politique ?

Le film de Jack Smight est ainsi un film typiquement hollywoodien, en dépit du tournant de 1967 par lequel le cinéma américain évolue et tend à se politiser¹², dans un contexte de forte opposition à la guerre du Vietnam et de lutte pour les droits civiques. Outre son casting d’acteurs ayant pour la plupart connu la célébrité avant 1967, appartenant ainsi à une « ancienne génération », et dont plusieurs avaient notamment servi dans l’armée américaine pendant la Seconde Guerre mondiale, on retrouve dans le film de Jack Smight des scènes présentant de nombreux lieux communs propres au film hollywoodien de l’époque, parmi lesquels scènes d’action, violence, culte du chef (les amiraux et les officiers en général occupent une place centrale dans le film), etc, abordés du point de vue surplombant des états-majors¹³.

Au vu de ce mouvement, une lecture possible de ce film pourrait l’inscrire dans ce que Brigitte Gauthier nomme la « contre-révolution hollywoodienne¹⁴ », ayant lieu dans les années 1970 et transposant des valeurs pour le moins conservatrices, notamment sous la présidence de Richard Nixon (1969 – 1974) – bien que l’engagement de Charlton Heston en faveur du mouvement des droits civiques dans les années 1960 soit à souligner. Là où Hollywood se saisit à de nombreux endroits de la guerre du Vietnam et de l’opposition populaire à ce conflit¹⁵ et n’hésite pas à pointer du doigt les atrocités que l’armée américaine a pu commettre durant son histoire, notamment durant les guerres indiennes (l’on pense ici en tout premier lieu à Little Big Man d’Arthur Penn, sorti en 1970), les lieux communs dont il est ici question, présents dans un certain nombre d’autres films des années 1970, contribuent à inscrire le Midway de Jack Smight dans cette « contre-révolution ».

Dans un contexte où la société américaine se trouve profondément divisés (autour de la guerre froide, du conflit vietnamien, etc…) et où la société américaine tend à évoluer vers la droite de l’échiquier politique¹⁶, le Midway de 1976 invite à un retour vers la Seconde Guerre mondiale, conflit où la population des États-Unis s’était à l’inverse retrouvée profondément unie après l’attaque japonaise sur Pearl Harbor.

Munich, 24 octobre 2019

Le film de la rigueur historique

Beaucoup plus récemment est sorti le dernier film en date dédié à la bataille, sobrement intitulé Midway etréalisé par Roland Emmerich, dont la première se tint à Munich en octobre 2019. Contrairement au film de 1976, et en dépit de quelques imprécisions, ce film est beaucoup plus rigoureux sur le plan historique, un objectif clairement affiché de la production comme du réalisateur. La narration débute dès décembre 1937, lorsqu’Edwin Layton, alors attaché naval adjoint à Tokyo, rencontre l’amiral Yamamoto, puis une ellipse amène le spectateur au matin du 7 décembre 1941 et à l’attaque sur Pearl Harbor, à la suite de quoi le déroulement des événements jusqu’à Midway est aussi complet que précis : on y découvre en effet le raid sur les îles Gilbert et les îles Marshall, le raid de Doolittle, les problèmes de santé de l’amiral Halsey et son remplacement par Spruance, le rôle de Rochefort et Layton dans l’interception des messages japonais, l’épisode de la cible « AF », et se termine sur la bataille de Midway en elle-même, qui occupe près du tiers du film. Celui-ci montre également John Ford et le tournage de son documentaire (ce que le film de 1976 ne fait pas), n’intégrant pas d’images du film de 1942 mais intégrant sa réalisation à l’intrigue, ainsi que de nombreux personnages historiques de premier plan absents du film de 1976 comme les pilotes américains Richard Best et Clarence Dickinson, alors que le film de 1976 se contentait de montrer les principaux commandants comme C. Wade McClusky, commandant de l’aviation embarquée sur l’USS Enterprise qui avait mené la troisième vague couronnée de succès sur les porte-avions japonais.

Ce souci de l’exactitude historique va jusqu’à l’utilisation de décors grandeur nature reproduits en studio à Montréal, et celle d’un sous-marin de la Seconde Guerre mondiale, aujourd’hui converti en navire-musée et amarré à Pearl Harbor¹⁷.

« La mer se souvient des siens ». Un film dédié aux combattants des deux côtés

Enfin, le film de Roland Emmerich revêt un important aspect mémoriel. En effet, celui-ci est dédié aux marins des deux camps ayant servi à Midway, sans distinction, Américains comme Japonais. Si le résumé des destinées des différents personnages présenté à la fin du film regroupe avant tout les biographies des principaux personnages américains, ce résumé inclut également celui de l’amiral Yamamoto.

De la même manière, l’aspect linguistique et l’origine des acteurs interprétant les personnages japonais représentent ici un détail important qui mérite d’être relevé. À l’inverse du film de 1976 où les personnages japonais s’expriment en anglais et où le casting inclut deux acteurs nippo-américains nés à Hawai’i¹⁸, dans celui d’Emmerich, à l’exception d’un court échange entre Layton et Yamamoto au début de l’histoire, les personnages japonais s’expriment dans leur langue maternelle et sont interprétés par des compatriotes. Bien que l’intrigue se déroule majoritairement du point de vue américain, et sans pour autant nier ni minimiser les crimes de guerre commis par l’armée japonaise¹⁹, le réalisateur avait ici tenu à ce que les deux points de vue soient représentés et bien compris du spectateur²⁰. Ainsi, dans un entretien figurant dans le making of du film, Roland Emmerich avait ainsi déclaré : « It enlightens people, it shows they’re also human, they’re also brave, so you can emphasize both sides²¹. »

Aussi, ce film marque l’aboutissement d’un long cheminement et, sans doute, l’amorce d’un nouveau. L’évolution des représentations de la bataille de Midway dans la fiction américaine, profite autant du passage du temps que de la redéfinition des alliances géopolitiques, par lesquelles les États-Unis et le Japon sont aujourd’hui devenue des nations alliées et amies, et grâce auxquelles le cinéma américain commence à s’intéresser au point de vue de l’adversaire. Le film de Roland Emmerich vient ainsi s’inscrire aux côtés du diptyque de Clint Eastwood, Mémoires de nos pères (2006) et Lettres d’Iwo Jima, montrant la bataille d’Iwo Jima respectivement du point de vue américain et du point de vue japonais.

Conclusion. La « série » Midway

Dans un article paru en 1973 intitulé « Le film, une contre-analyse de la société ? », dans lequel il analysait notamment les rapports entre l’historien et le cinéma, Marc Ferro écrivait :

« Le film est observé, non comme une œuvre d’art, mais comme un produit, une image-objet, dont les significations ne sont pas seulement cinématographiques. Il ne vaut pas seulement par ce dont il témoigne mais par l’approche socio-historique qu’il autorise. Aussi l’analyse ne porte pas nécessairement sur l’œuvre en sa totalité ; elle peut s’appuyer sur des extraits, rechercher des “séries”, composer des ensembles. La critique ne se limite pas non plus au film, elle l’intègre au monde qui l’entoure et avec lequel il communique nécessairement²². »

De cette façon, les films produits aux États-Unis sur la bataille de Midway peuvent être considérés comme une « série », comme un ensemble, dont l’hétérogénéité ne remet pas en question les points communs. Au contraire, les trois films mis en parallèle ici, ayant recueilli des critiques globalement positives, s’inscrivent pleinement dans leurs genres respectifs, documentaire pour le premier, films de guerre pour les deux autres. Plus encore, on observe que la culture américaine, comme le rappellent André Kaspi, François Durpaire, Hélène Harter et Adrien Lherm, est une « culture vivante, en phase avec les réalités et les valeurs du présent²³ », en adaptation constante, avec laquelle le cinéma est en dialogue permanent.

À la croisée entre histoire des représentations²⁴, anthropologie visuelle²⁵, histoire de l’art et War Studies, l’étude des représentations de la Seconde Guerre mondiale au cinéma représente ainsi un terrain d’études particulièrement fécond dont l’exploration s’annonce tout aussi prometteuse.

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Sources

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Films de fiction

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Roland Emmerich (réal.), Midway, Centropolis / Starlight Culture / The Mark Gordon Co., 2019.

Films documentaires

John Ford (réal.), La Bataille de Midway, US Navy, 1942.

Vidéographie sélective

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« The Making of Midway », making of du film Midway de J. Smight, 1976 [en ligne] Youtube, consulté le 17 mai 2023

Presse

« Midway vs. Midway vs. The Battle of Midway: How the New Movie Stacks Up to Past Film Versions », 15 novembre 2019 [en ligne] consulté le 19 mai 2023, https://www.smithsonianmag.com/air-space-magazine/emmidwayem-versus-emmidwayem-versus-emmidwayem-how-latest-movie-about-battle-different-and-how-its-still-same-180973493/.

Jacques Mandelbaum, « Les nouveaux films sur la seconde guerre mondiale nous parlent des inquiétudes d’aujourd’hui », Le Monde, 14 janvier 2022 [en ligne] consulté le 21 mai 2023, https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/01/14/les-nouveaux-films-sur-la-seconde-guerre-mondiale-nous-parlent-des-inquietudes-d-aujourd-hui_6109414_3232.html.

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Notes

1. Voir notamment : Craig L. Symonds, Nimitz at War. Command Leadership from Pearl Harbor to Tokyo Bay, Oxford, Oxford University Press, 2022. — Craig L. Symonds, Histoire navale de la Seconde Guerre mondiale, trad. fr. Johan-Frédérik Hel Guedj, Paris, Perrin, 2020. — Craig L. Symonds, The battle of Midway, New York, Oxford University Press, 2013. ↩︎
2. Un article du Smithsonian Magazine en fait néanmoins une esquisse : « Midway vs. Midway vs. The Battle of Midway: How the New Movie Stacks Up to Past Film Versions », 2019 [en ligne] consulté le 19 mai 2023, https://www.smithsonianmag.com/air-space-magazine/emmidwayem-versus-emmidwayem-versus-emmidwayem-how-latest-movie-about-battle-different-and-how-its-still-same-180973493/. ↩︎
3. Shūe Matsubayashi (réal.), ハワイ・ミッドウェイ大海空戦 太平洋の嵐 (Hawai Middouei daikaikusen : Taiheiyo no arashi), Toho, 1960 — Le titre du film fut traduit en anglais par Storm over the Pacific. ↩︎
4. Jack Smight (réal.), Midway, Universal Pictures, 1976. ↩︎
5. Roland Emmerich (réal.), Midway, Centropolis / Starlight Culture / The Mark Gordon Co., 2019. ↩︎
6. Voir notamment : Marc Ferro, « Le film, une contre-analyse de la société ? », Annales. Économies, sociétés, civilisations, 1973-1, p. 109‑124 — et : Marc Ferro, Cinéma et histoire, Paris, Gallimard, 1993.
   ↩︎
7. Voir notamment : Elliot Carlson, Joe Rochefort’s War : The Odyssey of the Codebreaker Who Outwitted Yamamoto at Midway, Annapolis, Naval Institute Press, 2013.
   ↩︎
8. Olivier-René Veillon, « Why we fight : Hollywood en guerre », Inflexions, 42-3, 2019, p. 170. ↩︎
9. John Ford (réal.), La Bataille de Midway, 1942 [En ligne] Youtube, consulté le 15 mai 2023. https://www.youtube.com/watch?v=MW8tQ_6dqS8&t=1s.
   ↩︎
10. Henry Fonda (1905 – 1982) avait par ailleurs servi dans le Pacifique dans les rangs de l’US Navy pendant la Seconde Guerre mondiale, et avait fait l’une des voix off sur le documentaire de John Ford. Les deux hommes se connaissaient par ailleurs dès avant Pearl Harbor, puisqu’Henry Fonda avait tourné dans Les Raisins de la Colère (1940), adaptation du roman de Steinbeck réalisée par Ford. ↩︎
11. George H. Gay, Jr. (1917 – 1994) est le seul survivant de son escadrille. Lorsque son avion est abattu et s’écrase en mer, il parvient à s’en extraire et assiste à l’attaque victorieuse des bombardiers en piqué depuis l’océan, avant d’être secouru quelques heures plus tard. Son personnage apparaît dans le film de 1976 et dans celui de 2019. ↩︎
12. Brigitte Gauthier, « Le tournant de 1967 : remise en question du capitalisme » in Histoire du cinéma américain, 2^e éd., Paris, Hachette, 2004, p. 91-102. ↩︎
13. Il convient par ailleurs de noter que le point de vue des combattants n’est pas entièrement absent des films hollywoodiens de l’époque. De même, il est intéressant de souligner que la sortie du Midway de Jack Smight coïncide avec un bouleversement dans l’historiographie de la guerre, initié par le britannique John Keegan qui, par son ouvrage The face of battle (1976), introduit le courant de la new military history, visant à rompre avec l’histoire-bataille et à aborder la guerre du point de vue des combattants, arborant ainsi une forte composante anthropologique. ↩︎
14. Brigitte Gauthier, Histoire du cinéma américain, op. cit., p. 99. ↩︎
15. La guerre du Vietnam est représentée ou est au cœur de l’intrigue d’un très grand nombre de longs métrages, jusqu’à tout récemment. L’on signalera ainsi la sortie en octobre 2020 des 7 de Chicago, réalisé par Aaron Sorkin.
    ↩︎
16. Jacques Portes, Histoire des États-Unis de 1776 à nos jours, Paris, Armand Colin, 2^e éd., 2013, p. 323. ↩︎
17. « Midway behind the scenes », 2019 [en ligne] Youtube, consulté le 17 mai 2023, https://www.youtube.com/watch?v=EWBXZLL8wJA.
    ↩︎
18. « Midway vs. Midway vs. The Battle of Midway : How the New Movie Stacks Up to Past Film Versions », 15 novembre 2019 [en ligne] Smithsonian Magazine, consulté le 17 mai 2023. https://www.smithsonianmag.com/air-space-magazine/emmidwayem-versus-emmidwayem-versus-emmidwayem-how-latest-movie-about-battle-different-and-how-its-still-same-180973493/ ↩︎
19. Ceux-ci sont au contraire bien montrés dans le film, notamment à deux occasions : dans le cadre de la fuite du lieutenant-colonel Doolittle cherchant à quitter la Chine occupée, et lorsque le mitrailleur Bruno Guido est attaché à une ancre et jeté par-dessus bord du destroyer japonais qui l’avait capturé avec son pilote, après que leur avion ait été abattu et se soit écrasé en mer. ↩︎
20. « Midway behind the scenes » [en ligne] Youtube, consulté le 17 mai 2023, https://www.youtube.com/watch?v=EWBXZLL8wJA.
    ↩︎
21. Idem — traduction de l’auteur : « cela éclaire les gens, cela montre qu’ils étaient également humains, qu’ils étaient également braves,il est donc possible de mettre l’accent sur les deux côtés. » ↩︎
22. Marc Ferro, « Le film, une contre-analyse de la société ? », Annales. Économies, sociétés, civilisations, n^o 1, 1973, p. 114. ↩︎
23. André Kaspi, François Durpaire, Hélène Harter et Adrien Lherm, La civilisation américaine, 2^e éd., Paris, PUF, 2006, p. 196 ↩︎
24. Voir notamment : Georges Duby, « Histoire des mentalités », in L’Histoire et ses méthodes, Paris, Gallimard, coll. « Pléiade », 1961, p. 937‑966.
    ↩︎
25. Voir notamment : Sophie Accolas et Nadine Wanono Gauthier, « Création et transmission en anthropologie visuelle », Journal des anthropologues. Association française des anthropologues, 130/131, 2012, p. 17‑29. ↩︎

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